Le droit au renouvellement est l’un des piliers du statut des baux commerciaux. Un mécanisme juridique de compensation est donc prévu pour protéger le locataire, lorsque ce droit est refusé par le propriétaire. Pour les entreprises, il est essentiel de bien comprendre le concept de l’indemnité d’éviction, pour préserver leur activité et leurs intérêts financiers. Alors, à quoi correspond-elle ? comment fonctionne-t-elle et de quelle manière est-elle calculée ? Quels sont vos droits en tant que locataire et quels recours existent-ils, en cas de litige avec le bailleur ? Découvrons tout ce que vous devez savoir sur le sujet.

Indemnité d’éviction du bail commercial : à quels droits pouvez-vous prétendre ?

Dans le cadre d’un bail commercial, le locataire du local commercial bénéficie d’un droit au renouvellement, inscrit dans le Code du Commerce. Si le propriétaire manifeste un refus d’y procéder, une indemnité d’éviction lui est alors réclamée. Celle-ci vient couvrir le préjudice subi par une compensation financière : valeur du fonds de commerce, frais de déménagement, perte d’activité et donc de revenus… La cour de cassation précise que l’indemnité doit réparer les préjudices directs comme indirects.

Indemnité d’éviction sous bail commercial : guide complet pour les entreprises

Dans cet article, nous vous aidons à aborder le cadre de l’indemnité d’éviction du bail commercial, son calcul, ses conséquences fiscales et les méthodes de recours possibles, mais également comment anticiper cette situation.

Comprendre l’indemnité d’éviction dans le cadre d’un bail commercial

Qu’est-ce qu’un bail commercial ?

Le bail commercial est un contrat conclu entre un propriétaire et un locataire pour la location d’un local commercial, destiné à une activité commerciale, industrielle ou artisanale. Il bénéficie d’un régime juridique spécifique, particulièrement protecteur pour le preneur. La durée minimale du bail commercial est fixée à 9 ans, avec possibilité de résiliation triennale pour le preneur. Il accorde un droit au renouvellement au locataire, sauf refus du bailleur avec indemnité d’éviction.

L’éviction du locataire : définition juridique et cas de figure

L’éviction qualifie le refus du bailleur de renouveler le bail commercial à son échéance. Cette décision a pour conséquence de priver le locataire de son droit au renouvellement, l’obligeant à quitter les locaux. L’éviction doit être justifiée légalement et motivée par un projet de démolition, de rénovation lourde, de reprise pour usage personnel ou commercial par le propriétaire. Le refus de renouvellement doit être notifié dans un délai de 6 mois avant l’échéance du bail par congé délivré par acte d’huissier, afin de laisser le temps au locataire d’organiser sa transition.

Que recouvre précisément une indemnité d’éviction ?

L’indemnité d’éviction vise à compenser intégralement le préjudice causé au locataire par le non-renouvellement de son bail commercial. Cette réparation financière couvre plusieurs composantes distinctes, devant permettre au preneur de reproduire sa situation ailleurs. La valeur du fonds de commerce constitue l’élément principal de l’indemnité d’éviction. Elle intègre également les frais de déménagement, les frais de réinstallation, les droits de mutation à payer pour acquérir un fonds de même valeur et l’estimation de la perte d’activité engendrée durant la période de transition. Dans la majorité des cas, c’est le tribunal judiciaire qui fixe le montant, basé sur une évaluation opérée par un expert.

Notez toutefois que certaines situations particulières (évaluées par les tribunaux) peuvent justifier l’éviction du locataire sans indemnité, comme l’inexploitation du fonds de commerce, la cessation d’activité non déclarée ou encore l’insalubrité du local.

Bon à savoir : L’indemnité d’éviction ne peut être refusée qu’en cas de faute grave et légitime du locataire (Source : Service Public).

Comment est calculée l’indemnité d’éviction d’un bail commercial ?

Valeur du fonds de commerce

L’indemnité d’éviction est constituée d’une indemnité principale, correspondant à la valeur marchande du fonds de commerce. Si le fonds est amené à disparaître, on parle d’indemnité de remplacement. Si le fonds peut être déplacé, on parle d’indemnité de déplacement.

Frais de déménagement et de réinstallation

Le locataire évincé peut prétendre au versement d’indemnités accessoires complémentaires. Les frais de déménagement, les frais de résiliation du fonds, les frais de mutation d’un nouvel achat de fonds de commerce, ainsi que les frais de réinstallation liés au transfert de l’activité vers de nouveaux locaux commerciaux sont ainsi évalués.

Pertes éventuelles de chiffre d’affaires

La perte d’activité temporaire résultant du déménagement est, elle aussi, valorisée dans le cadre de l’indemnisation d’éviction comme trouble commercial. Cette compensation vise à couvrir la baisse de chiffre d’affaires engendrée par la phase de transition et la réinstallation de l’activité.

Indemnités accessoires : remploi, licenciement, aménagement…

D’autres indemnités accessoires viennent réparer le préjudice du locataire. L’éviction peut en effet générer des frais de licenciement du personnel, des frais de réemploi, des frais de résiliation de contrats en cours ou encore une perte de licence par exemple.

Bon à savoir : Selon la Cour de cassation, l’indemnité d’éviction dépend des conséquences économiques directes pour le locataire.

Quels recours si le bailleur refuse ou conteste le paiement de l’indemnité ?

Saisir le tribunal judiciaire

En cas de refus ou de contestation du montant de l’indemnité d’éviction par le bailleur, le tribunal judiciaire peut être saisi par le locataire, pour trancher le litige et fixer le montant de l’indemnisation. Cette procédure implique l’assistance d’un avocat et s’appuie sur une expertise judiciaire. Elle doit s’opérer dans le délai légal imparti.

Tentative de conciliation ou de médiation

La conciliation ou la médiation dont des solutions amiables, permettant de réduire à la fois les délais et les coûts de la procédure. Cette approche s’avère particulièrement appropriée lorsque le différend porte uniquement sur le montant de l’indemnité. L’intervention d’un médiateur facilite le rééquilibrage des négociations entre les deux parties.

Délais de versement et intérêts de retard

Le paiement de l’indemnité d’éviction doit intervenir préalablement à la libération des locaux. Il s’effectue directement auprès du preneur ou par le biais d’un compte séquestre. Le locataire dispose alors de 3 mois pour restituer les lieux, une fois la somme intégralement versée. Un retard de paiement ouvre droit à des intérêts de retard.

« L’indemnité d’éviction a pour objet de réparer intégralement le préjudice causé par le refus de renouvellement du bail » – Code de commerce, article L145-14.

Cas particuliers à connaître en matière d’indemnité d’éviction

Refus de renouvellement avec offre de relogement

Si le bailleur propose au locataire une solution de relogement, par un local de remplacement présentant des caractéristiques équivalentes, l’indemnité d’éviction peut alors être réduite ou annulée. Cette offre doit respecter des conditions strictes pour être valable (localisation, caractéristiques techniques, surface, conditions locatives, zone de chalandise…).

Inexploitation des locaux : quelles conséquences sur l’indemnisation ?

L’inexploitation du fonds de commerce par le preneur prive le locataire de son droit à l’indemnité d’éviction. Des circonstances exceptionnelles peuvent être admises, mais cette appréciation est soumise au contrôle des tribunaux.

Locataire sans immatriculation au RCS

L’absence d’immatriculation au registre du commerce et des sociétés (RCS) peut compromettre le droit à l’indemnité d’éviction du locataire. Elle est en effet garante de l’existence d’une activité commerciale dans les locaux.

Bon à savoir : L’absence d’exploitation effective du fonds de commerce peut réduire ou annuler votre droit à l’indemnité.

Indemnité d'éviction bail commercial

Bail commercial, indemnité d’éviction et fiscalité

Régime applicable pour le locataire

Pour le locataire soumis à l’impôt sur le revenu, l’indemnité qui compense la perte d’un actif est régie par le régime des plus-values professionnelles. Celle qui compense une charge ou un manque de revenu est intégrée au résultat imposable au taux normal. Pour le locataire soumis à l’impôt sur les sociétés, la globalité du montant est comprise dans le résultat au taux normal.

Conséquences fiscales pour le bailleur

Pour le bailleur soumis au régime BIC ou à l’impôt sur les sociétés, l’indemnité d’éviction du locataire est considérée comme une charge déductible ou comme prix de revient d’un actif, selon la finalité visée par l’opération. Le propriétaire soumis à l’imposition des revenus fonciers peut déduire l’indemnité des recettes brutes dans certains cas.

Comment anticiper une indemnité d’éviction dans votre stratégie immobilière ?

Négocier les clauses du bail dès la signature

La négociation initiale du bail commercial conditionne vos droits de locataire en cas d’éviction. Il doit donc être étudié avec attention, car des clauses protectrices peuvent mieux encadrer une éventuelle éviction.

Anticiper le risque d’éviction dans vos prévisions budgétaires

L’intégration du risque d’éviction dans la stratégie de l’entreprise permet d’anticiper les conséquences financières d’un refus de renouvellement du bail commercial. Cette approche préventive facilite la gestion de crise, afin de préserver au mieux la poursuite de l’activité. Des provisions pour éviction peuvent ainsi constituer un outil de gestion intéressant à adopter.

Se faire accompagner par un expert immobilier

Les experts de l’immobilier d’entreprise peuvent vous aider à sécuriser vos locations et à anticiper les conséquences d’une résiliation de bail commercial.

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Questions fréquentes

Qui peut bénéficier de l’indemnité d’éviction dans un bail commercial ?

Tout locataire dont l’activité est inscrite au RCS et titulaire d’un bail commercial est protégé par le statut des baux commerciaux et peut donc prétendre à une indemnité d’éviction en cas de non-renouvellement de son bail.

Comment calculer le montant de l’indemnité d’éviction sous bail commercial ?

L’estimation de l’indemnité d’éviction d’un bail commercial dépend de la valeur du fonds, des frais de déménagement, de réinstallation et de la perte d’activité, mais aussi des conséquences indirectes et préjudiciables subies par le locataire. Un expert est le mieux indiqué pour y procéder.

Quelle est la fiscalité applicable à une indemnité d’éviction ?

La fiscalité de l’indemnité d’éviction varie selon la nature des sommes perçues et les régimes auxquels sont soumis le bailleur et le preneur.

L’indemnité d’éviction couvre-t-elle les frais de réinstallation ?

Oui, l’indemnité d’éviction du bail commercial inclut effectivement les frais liés à la réinstallation du locataire : déménagement, travaux d’aménagement, frais administratifs liés au changement d’adresse…

Un locataire peut-il refuser l’éviction malgré l’indemnité proposée ?

Le locataire peut contester l’évaluation de l’indemnité d’éviction et demander une nouvelle estimation de son montant devant le tribunal judiciaire, mais il ne peut pas s’opposer au refus de renouvellement émis par le bailleur.

Sources officielles :

Service Public : https://entreprendre.service-public.fr/vosdroits/F32783

Legal Place : https://www.legalplace.fr/guides/baux-commerciaux-lindemnite-deviction/

Code du Commerce (Art. L.145-14) : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006221741

Alexis Estevao