La semaine dernière, nous vous présentions la définition du statut de l’EIRL, nous poursuivons aujourd’hui avec son régime juridique, les formalités pour en bénéficier et ses limites.

En quoi le statut de l’EIRL est-il protecteur ?

Le statut de l’EIRL entraîne une séparation des patrimoines de l’EIRL et permet de protéger son patrimoine personnel.

En revanche, cette séparation n’est opposable* qu’aux créanciers dont les droits sont nés postérieurement à l’affectation des biens au patrimoine professionnel. Il faut donc les distinguer les créanciers dont les droits sont nés postérieurement à l’affectation.

  • Situation des créanciers dont les droits sont nés après l’affection

Pour les créanciers dont les droits sont nés après l’affection, la séparation des patrimoines s’applique. Dans ce cas, il faut distinguer deux catégories de créanciers. Les créanciers professionnels d’une part, c’est-à-dire ceux dont les droits naissent à l’occasion de l’exercice de l’activité professionnelle et qui ont pour seul droit de gage le patrimoine professionnel. Les créanciers personnels d’autre part, dont les droits naissent dans le cadre de la vie personnelle de l’entrepreneur et qui ont pour seul droit de gage le patrimoine personnel.

Prenons l’exemple d’un entrepreneur qui souscrit un emprunt pour financer, dans le cadre de son activité, l’achat de matériel. S’il ne le rembourse pas, l’établissement de crédit pourra saisir l’ensemble des biens constituant son patrimoine professionnel. En revanche, il ne pourra pas saisir ses biens personnels, comme sa résidence secondaire ou son véhicule familial par exemple.

À l’inverse, si l’entrepreneur contracte un prêt pour acheter un véhicule familial et qu’il ne le rembourse pas, la banque pourra saisir le véhicule ou tout autre bien personnel, mais ne pourra pas saisir ceux relevant de son patrimoine professionnel comme le matériel ou la marchandise nécessaires à son activité.

  • Situation des créanciers dont les droits sont nés avant l’affection

En revanche, pour les créanciers dont les droits sont nés avant l’affectation, la séparation des patrimoines est sans effet. Qu’ils soient professionnels ou personnels, ils peuvent saisir l’intégralité du patrimoine de l’entrepreneur.

Ainsi, si ce dernier ne rembourse pas le prêt contracté dans le cadre de son activité, pour financer l’achat de matériel par exemple, l’établissement de crédit pourra, outre le matériel et la marchandise, saisir son véhicule personnel ou sa résidence secondaire.

Quelles sont les formalités pour bénéficier de ce statut ?

L’entrepreneur qui souhaite bénéficier du statut de l’EIRL doit en faire la déclaration auprès du registre légal auquel il est tenu de s’immatriculer (le registre du commerce et des sociétés pour un commerçant et le répertoire des métiers pour un artisan). Pour l’entrepreneur qui n’est pas soumis à une obligation d’immatriculation, c’est-à-dire le professionnel libéral ou l’agriculteur, la déclaration se fait auprès du greffe du tribunal de commerce ou de la chambre de l’agriculture.

La déclaration est assortie d’un état descriptif des biens affectés au patrimoine professionnel et précise leur valeur vénale ou, à défaut, leur valeur d’utilité.

Par ailleurs, il convient de noter que les biens immobiliers font l’objet d’une procédure particulière. Leur affectation est subordonnée à un acte notarié et doit être publiée au bureau des hypothèques.

Une fois le patrimoine constitué, l’inscription ou le retrait en comptabilité d’un bien, droit, obligation ou sûreté emporte affectation à l’activité professionnelle ou retrait du patrimoine affecté

Quelles sont les limites du statut de l’EIRL ?

Si le statut de l’EIRL constitue une protection efficace du patrimoine personnel de l’entrepreneur, il présente néanmoins deux limites, l’une économique, l’autre juridique.

D’un point de vue économique, la réduction du droit de gage des créanciers constitue un frein au financement et à l’octroi de crédit.

Sur le plan juridique, l’article L. 526-12 du Code de commerce prévoit que l’entrepreneur individuel perd le bénéfice de la séparation des patrimoines, c’est-à-dire redevient responsable sur la totalité de son patrimoine, y compris ses biens personnels, en cas de fraude ou de manquements à ses obligations, notamment comptables.


Lexique

* L’opposabilité est l’aptitude d’un droit, d’un acte ou d’une situation à produire des effets vis-à-vis des tiers, c’est-à-dire à l’égard de ceux qui ne sont ni titulaires du droit, ni parties à l’acte, ni concernés par la situation.


Dans notre prochain article dédié aux questions juridiques, nous vous proposerons d’en savoir plus sur la notion de fonds de commerce. En attendant, savez-vous que vous pouvez réaliser une étude sur le trajet domicile-travail de vos salariés grâce à Mes Employés ? 😉

Alexis Estevao